Jean-Marc : « J’ai toujours aimé le côté technique »

C’est une figure bien connue des pontons de courses au large. Jean-Marc Lenormand, ou « Carabot * », prépare, construit, bichonne des bateaux depuis près de 20 ans. « J’ai toujours aimé le côté technique. » Une véritable vocation née dès l’enfance, en mer avec son père et sur les pontons de la Route du Rhum… Mais Jean-Marc a aussi vécu d’autres vies : il nous raconte.

Il navigue depuis toujours. A 6 ans, son papa l’emmène au départ de la Route du Rhum. « Cette course en a fait rêver plus d’un et j’en fait partie ! On a attrapé la même maladie avec P’tit Louis  ! Ce sont des histoires de passion… »

Mon papa faisait le Paris Dakar
« J’ai tout de suite aimé le côté technique. C’est surtout ça qui me plaisait. Mon papa faisait le Paris Dakar notamment, il était pilote : les week-ends on avait les mains dans le cambouis ! Ado, je l’aidais, je préparais le matériel de sécurité, entre autres…
J’ai fait un peu de rallyes, j’aimais bien ça, mais ça m’intéressait moins que la voile. »

Après l’école, j’embarquais avec mon cartable
« J’ai commencé à naviguer très tôt, avec mon père. Le vendredi, il venait me chercher à l’école, j’embarquais avec mon cartable et c’était parti ! On naviguait autour de Grandville, Chausey, Jersey, Guernesey… On était sur l’eau tous les week-end.
C’était quand même mieux que l’école !
Je revenais le lundi, mes devoirs n’étaient pas faits… Je me faisais engueuler par mon père, mais on avait passé le week-end à pêcher le crabe, le thon, le homard… les cahiers étaient restés au fond du cartable. »

Le truc improbable
« L’électricité, l’électronique m’ont toujours intéressé. Alors j’ai vite bifurqué vers une formation d’électronicien (la même que Marc Lefebvre, patron du chantier  V1D2).
Puis est venu l’âge du service militaire. Je ne voulais pas y aller, pour plusieurs raisons. Là, quelqu’un de très inspiré m’a conseillé de m’engager dans la Marine Nationale. J’y suis resté 11 ans ! Tout ça parce que je n’ai pas voulu faire mon service, le truc improbable. »

90 pays en 11 ans ! 
« J’étais mécanicien d’armes : je m’occupais de tous les systèmes d’armement (téléguidage, torpille…).
J’étais en mer tout le temps, sur des ravitailleurs de bateau amiral, des frégates anti-aériennes, des corvettes… et sur toutes les mers de monde. J’ai visité 90 pays en 11 ans !
Celui qui m’a le plus plu c’est le Chili… Valparaiso, ville des cap-horniers, ça cause ! Il y a une culture maritime très forte là-bas. L’accueil de gens… c’est puissant. »

J’ai pu en profiter un peu…
« Je ne sais pas pourquoi, mais je n’ai jamais le mal de mer, même avec le nez dans le gasoil. Et, dans la Marine Nationale, celui qui arrive à nettoyer le vomi et le gasoil en mer, on le laisse tranquille aux escales. J’ai pu en profiter un peu… »

J’ai croisé le bateau d’Ellen Mac Arthur
1996, un train de mesures d’allègement budgétaire au sein de l’armée inclut notamment des propositions de départ volontaire : un virage pour Jean-Marc.
« Je rentrais de campagne, je suis passé rendre compte à l’amirauté et là ils me proposent de me réaffecter, à terre, près de chez moi, au Havre…
Sur la route pour rentrer à la maison, je vois le bateau d’Ellen Mac Arthur qui passe sous le viaduc. Le « Kingfisher » allait au chantier V1D2.
J’ai fait demi-tour, discuté avec Marc Lefebvre. Il cherchait un profil comme le mien… Trois jours plus tard je commençais au chantier. J’y suis resté 11 ans ! »

Il se mettra ensuite à son compte pour être préparateur technique sur le circuit Figaro puis en Class40. « Avec de très belles rencontres. »

L’heure de la transmission
Louis et Jean-Marc s’étaient rencontrés chez V1D2 : « Louis a été stagiaire là-bas ! C’est d’ailleurs à lui que je dois mon surnom « Carabot » !
Et lorsque Louis s’essaie au Figaro en 2009, devinez qui sera son préparateur ?… « Pour ce type de bateau, on est tout seul à travailler, il faut être multitâche et autonome, j’aime bien ça. »

« En Imoca tout est beaucoup plus lourd et compliqué, mais au sein de l’équipe Fives – Lantana Environnement, on reste multitâches. Louisette et Grand Louis ont envie d’apprendre et ils le font bien. Quand ça se présente, je leur explique des trucs comme d’autres l’ont fait pour moi : Marc Lefebvre, Bernard Stamm, Hervé Laurent… m’ont beaucoup appris. »

* Carabot : groupe de sans-culottes constitué à Caen pendant la révolution française. A Caen, ce nom est devenu un adjectif pour qualifier des jeunes un peu rebelles… Alors, lorsque Louis est arrivé comme stagiaire au chantier V1D2, Jean-Marc l’appelait Carabot. Mais, au final, selon le principe de l’arroseur arrosé, c’est lui qui a hérité de ce surnom !